Style
Style inspiré des musiques cubaines au début des années 50, la rumba congolaise a évolué progressivement vers un genre africain à part entière qui exercera sa suprématie sur les musiques africaines modernes. Née dans les capitales jumelles des deux Congo, Kinshasa (ex-Léopoldville) et Brazzaville, la rumba s’y perpétue et s’y transforme au sein de formations faisant fonction d’écoles pour les jeunes de musiciens.
Une industrie musicale se développe à Kinshasa au milieu des années 50. Elle bénéficie du plus puissant émetteur radio du continent installé par l’administration belge à Léopoldville. L’abondante production des orchestres congolais arrose ainsi le très vaste pays et tous ses voisins. Wendo Kolosoy, ancien boxeur surnommé le “père de la rumba congolaise”, a fait ses premiers enregistrements en 1948 s’accompagnant à la guitare sèche. Éclipsé de la scène sous l’ère Mobutu (1966-1997), Wendo bénéficiera d’un magnifique retour sur les scènes du monde en 1999, âgé de 75 ans, avant de disparaître en 2008.
La deuxième génération de la rumba congolaise étoffe sensiblement l’orchestre, empruntant au jazz la contrebasse et les vents, mais pas encore la batterie, les percussions locales faisant parfaitement l’affaire. L’African Jazz de Joseph Kabasselé, alias le Grand Kallé (1930-82), s’impose avec son style de rumba dès sa formation en 1953. C’est lui qui accompagne à Bruxelles les politiciens congolais venus signer l’accord d’indépendance, le 29 janvier 1960. Il en témoigne auprès du peuple avec son hymne “Indépendance Cha-Cha” composé dans la nuit même. Jusqu’à sa dissolution en 1963, l’African Jazz aura été parmi les grands leaders de la scène congolaise, avec des musiciens d’envergure comme le chanteur Tabu Ley Rochereau ou Dr Nico, au jeu de guitare volubile et inventif.
Jeune dieu de la six cordes électrique, Franco s’impose dès 1956 avec son OK Jazz comme le grand rival de l’African Jazz, rivalité qui se poursuit avec les deux branches de l’African Fiesta (National de Rochereau et Sukisa de Dr Nico) qui lui succèdent. À Brazzaville, les meilleurs musiciens de cette génération passeront par Les Bantous de la Capitale, dont le Kinois Papa Noël Nedule fut l’un des premiers et plus célèbres guitaristes.
Au début des années 70, la troisième génération de la musique congolaise donne un coup de vieux à la rumba des deux mastodontes, Franco et Rochereau, qui se partagent le marché. A côté de la machinerie lourde de leurs orchestres, les jeunes de Zaïko Langa Langa emmenés par Papa Wemba, silhouettes filiformes cintrés dans leurs costumes à pattes d’éléphants, apportent un souffle vif, funky. Le tempo s’accélère pour forger le “soukouss”, sorte de rumba rock. Les cuivres disparaissent au profit des guitares, qui se lâchent en solo, chaque fois plus torrides, pendant le “sebene”, où les danseurs s’en donnent à cœur joie. La batterie entre dans la danse, avec ce fameux rythme sur la caisse claire, baptisé “machine ya Kaouka”, qui rappelle les roues d’un train sur les rails, toujours utilisé dans le ndombolo. Papa Wemba, Pépé Kallé, Kanda Bongo Man ou Bozi Boziana figurent parmi les stars de cette troisième génération.
Les guerres intestines ne cessent de secouer les tenants de la quatrième génération, née dans les années 80, comme l’emblématique Wenge Musica. La dissidence semble être devenu un sport national, voire une obligation si les groupes veulent rester au premier plan de l’actualité… Musicalement, cette nouvelle tendance s’affirme avec l’utilisation des synthétiseurs, et surtout la présence de plus en plus envahissante d’animateurs dans la section vocale. Il est chargé de chauffer les danseurs de ndombolo avec des gimmicks de son cru. Certaines vedettes, à l’image de Koffi Olomide, finissent parfois par quasiment s’abstenir de chanter, se contentant d’égrener des litanies de noms de personnes, dont le plus grand mérite est d’avoir su graisser la patte de l’artiste pour s’entendre cité dans une chanson…
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