Style
Début des années 1990. Après la folie du disco et le règne des superstars du rock et de la pop comme Queen ou David Bowie, les oreilles du monde sont désormais pleines de hip-hop ou de grunge. Le rap américain, tout comme le rock désespéré de Nirvana squattent le podium de tous les classements. Une invasion de l’Oncle Sam qui est loin de plaire à une bonne partie des jeunes Britanniques de la Génération X.
Qu’à cela ne tienne, à eux de rendre ses lettres de noblesse à la scène anglaise ! Ainsi naît la Britpop, cette pop dérivée du rock alternatif, digne héritière des artistes de la « British Invasion » des années 1960 et 1970. En s’inspirant des groupes british qui ont conquis le monde avant elle, des Pink Floyd à Led Zeppelin, en passant par les Rolling Stones, les Beatles bien sûr, les Who, les Sex Pistols, les Clash ou encore Joy Division, la Britpop prend son essor. Le musicien et compositeur Paul Weller, figure de la scène punk et du renouveau mod, en sera l’un des parrains.
Plusieurs albums caractérisent la Britpop, tant dans les paroles, pleines d’esprit et terriblement efficaces, que dans le son, d’une énergie folle : Modern Life Is Rubbish de Blur (1993), Suede du groupe éponyme (1993), Definitely Maybe d’Oasis (1994), et I Should Coco de Supergrass (1995). Le succès ne se fait pas attendre. La vague Britpop déferle tant en Europe qu’aux États-Unis. Le Royaume-Uni tient enfin tête musicalement au mastodonte américain avec une esthétique bien particulière qui exprime avec finesse les contradictions de la société britannique moderne, toujours engluée dans la lutte des classes, en proie à la mondialisation.
La Britpop est marquée par une grande fracture musicale et culturelle incarnée par la rivalité entre les Londoniens de Blur, dont les membres sont issus de la classe moyenne, et Oasis, représentant du Nord de l’Angleterre et des classes ouvrières pauvres et déshéritées. D’autres groupes marquent l’histoire éphémère de la Britpop, comme Supergrass qui signe l’hymne de l’été 1995 avec le morceau « Alright ». Si ces rivalités sont bien réelles, elles sont aussi le moteur des ventes de la Britpop qui offre une arme de promotion massive à la culture britannique. Tout en mettant un coup de projecteur sur la « vie normale » de millions de Britanniques, les groupes de la Britpop revendiquent presque à outrance leur « Britishness » (le « Union Jack » est partout sur les pochettes d’album, les paroles sont scandés avec des accents bien prononcés). Guitares réverbérées, mélodies enjouées, accords simples, le genre musical fait la fierté de tout un pays et notamment sa population la plus précaire, meurtrie par les années Thatcher et désormais héroïne des plus gros hits des années 1990. Prenons « Common People » de Pulp sorti en 1995 s’il fallait n’en citer qu’un.
La Britpop finira pourtant par vite s’essouffler. Le public en demande trop, les groupes sont éreintés, abîmés par la vie de rockstars et n’arrivent plus à innover. Même les têtes d’affiche, Oasis et Blur, s’éloignent progressivement du son Britpop, et le genre s’éteint.
Si, aujourd’hui, la Britpop n’existe plus en tant que telle, son héritage, lui, reste vivant. Elle a influencé durablement la mode, les arts visuels et le cinéma. Aussi, elle a, pour un moment, resserré les liens dans un pays clivé et a fait de l’Angleterre, durant les quelques années de son âge d’or, le pays le plus cool du monde.
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