Artiste
Lyon, France
Magnifique de grâce et de tempérament, Catherine Ribeiro a posé une griffe et une autorité incontestables sur la scène française des années 70. Farouchement indépendante et revêche aux tentatives de normalisation et d’aseptisation d’un show business frileux, machiste et réac, elle refuse un rôle de chanteuse-à-la-mode pour fréquenter les sous-bois d’une poésie ardente.
Née en 1941 dans une famille de l’immigration portugaise travaillant dans les usines de la chimie lyonnaise, elle se fraie rapidement un chemin vers l’expression artistique, cinéma et chanson. Actrice pour un film de Jean-Luc Godard, elle fait la rencontre décisive de Patrice Moullet, son alter ego dans le groupe qu’ils fondent, Alpes, devenu son compagnon.
Dans la France bouillonnante des années 60, entre fin de la guerre d’Algérie et explosion sociale et culturelle de 68, elle affirme vite sa sensibilité artistique et sa conscience politique dans le sillage de Juliette Gréco, Colette Magny et bien sûr Léo Ferré. Il y a du Piaf (qu’elle chante depuis toujours) dans sa voix ample et impressionnante de profondeur toute martiale. Et comment ne pas sentir son empreinte chez Catherine Ringer ?
Catherine Ribeiro + Alpes, le nom de son groupe, se produit dans les premiers festivals pop, notamment à Aix-en-Provence, dans lesquels il peaufine une expérience scénique, musicale et visuelle inédite, très courue d’un public converti aux compositions longues, pleines d’arborescences complexes, établissant un lien entre théâtre et musique. Avec des groupes tels Magma, Lard Free ou encore Komintern, la formation participe de l’affirmation d’un courant musical très riche et influent quoique très underground, en général très politisé, libertaire et situationniste. Riche en ambiances planantes et en séquences improvisées, la musique de Catherine Ribeiro + Alpes laisse la part belle aux claviers et synthétiseurs, notamment au cosmophone. Inventé par Patrice Moullet cet instrument électroacoustique s’inspire de la viole de gambe.
Bien qu’ignoré des médias, le groupe réalise neuf albums et donne des centaines de concerts en France et à l’étranger. Familière de la Fête de l’Humanité, Catherine Ribeiro ne ménage pas son énergie pour soutenir les causes qu’elle partage : Chili, entreprises en grèves, combats féministes, Palestine… Elle ne renie pas ses premières amours enregistrant un disque d’hommage à Edith Piaf et un autre à Jacques Prévert, quand elle participe à la première édition du Printemps de Bourges puis figurera à l’affiche des Francofolies.
Comme d’autres artistes de sa génération et de sa trempe elle sera snobée par les années 80 et leur arrogance dorée. Ce qui ne l’empêchera pas d’occuper d’importantes scènes parisiennes devant un public fidèle et ardent et de mettre en disque de nouveaux projets : comme Percuphonante (1986), Fenêtre ardente (1993).
Cette femme courageuse aux fêlures nombreuses s’éloignera progressivement des feux de la scène avant disparaître le 23 août 2024 à Martigues, dans les Bouches-du-Rhône.
Les paroles ne sont qu'un accessoire, je préférerais qu'on en arrive presque à des onomatopées pour remplacer les paroles. On le fera peut-être ; il faudrait que la voix serve d'instrument… Ce que je cherche à faire, c'est détruire complètement la chanson classique, avec refrain et couplets réguliers.Catherine Ribeiro en entretien, années 1970
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