Fever Ray

La bizarrerie, c’est tout un art : on comprend ça très vite lorsqu’on s’intéresse à Fever Ray. Auteur-trice, compositeur-trice, interprète, l’artiste suédois.e né.e en 1975 cultive un univers radicalement hors du commun.

Karin Dreijer commence sa carrière musicale avec le groupe Honey Is Cool, avant de lancer avec son frère The Knife en 1999. Avec ce groupe synth-pop, iel (Karin Dreijer se définit de genre fluide) écumera les salles de concert avec succès pendant quinze ans. C’est lors d’une pause du groupe en 2009 que Fever Ray naîtra avec un premier album éponyme. L’artiste prend son temps entre chaque sortie d’album pour offrir à chaque fois des petits ovnis musicaux toujours renouvelés. Difficile de ranger la musique de Fever Ray dans une case, à l’instar de l’artiste. Fever Ray se veut caméléon. Résolument queer, iel cultive une sauvagerie electro élégante et une étrangeté pop savamment étudiée. Chaque album est l’expression d’un genre différent. De titres cold-wave torturés à un dernier album Radical Romantics bien plus pop, la musique de Fever Ray louvoie entre synth-wave, electronica et électro-pop, toujours sur la crête.

Être à la marge, ça se travaille avec la plus grande minutie. Tout est dans le détail : les sonorités sont modelées, façonnées d’une main experte. La voix est taillée sur mesure, élément principal du morceau mais aussi habillage sonore. Partout, des boucles surgissent, créant des textures sonores spectrales. L’image est aussi très travaillée, centrale même. La photo de profil de ses réseaux sociaux présente l’artiste sous un drôle de jour. Chauve, avec quelques longs cheveux blancs partant de derrière ses oreilles, Fever Ray accueille le public le visage enduit de maquillage blanc. Du jaune souligne ses sourcils, sa bouche et ses yeux, lui donnant un air malade alors qu’iel regarde droit dans la caméra en souriant. Un soin extrême est donné aux clips pour former des opus d’histoires et de récits.

Fever Ray marque certainement de sa patte le paysage de l’electro-pop. Le curieux alter ego de Karin Dreijer lui permet de se jouer des règles musicales et sociales. Son aspect pluri-facettes est une plateforme au service des récits queer et des expérimentations musicales les plus actuelles.