Morceau
Sorti en septembre 1999, “Je vous emmerde” est la première vraie rencontre entre Philippe Katerine et le grand public. Conversation de boîte de nuit entre un homme saoul et une femme qui n’en demandait pas tant, ce morceau dépeint le quotidien pathétique d’un type terriblement médiocre. Figure de l’anti-héros par excellence, ce “poète” interprété par Katerine nous offre un anti-egotrip par excellence.
Dans ce dialogue de sourd qui fait grincer des dents, Philippe Katerine laisse à voir dans le personnage de l’ivrogne, tout le rejet insolent d’une société basée sur l’argent et le travail : “J’aurais pu être millionnaire / Avec piscine et vue sur la mer / Mais je suis dans la merde / Et je vous emmerde !”. Là, où l’egotrip glorifie l’abondance financière et la sur-consommation, Katerine nous emmène à l’exact opposé.
Dans son monde, bien plus réaliste, le personnage principal est : “Sentimentalement, démissionnaire / Professionnellement, suicidaire”. Pour autant, il n’en perd pas son inspiration. En examinant ces deux phrases de plus près, on remarque une syntaxe très travaillée, truffée de figures de style. On y entend des assonances (répétition d’un même son voyelle). Dans la construction, on peut voir un parallélisme (répétition de la même structure de phrase) et un chiasme sémantique (croisement de deux éléments du même champ lexical). Pauvre, raté et seul : oui, mais tout de même un peu poète.
Le Philippe Katerine de “je vous emmerde” sert aussi à nous rassurer. Notre vie ? Pas géniale, mais ça pourrait être pire, on pourrait être bourré en boîte de nuit en train de harceler une femme. En effet, difficile de tomber plus bas. Cet homme fait figure de repoussoir, il le sait, et c’est bien pour cela qu’il nous crache son “je vous emmerde”. Une apostrophe à l’auditeur à peine dissimulée.
Avec “Je vous emmerde”, Philippe Katerine résume avec dérision dans un dialogue très cinématographique quelque chose de notre époque. Il touche cette volonté de rejeter un monde régi par l’argent et le succès tout en méprisant le marginal, bien au chaud dans notre canapé. Et ça chatouille parfaitement là où ça nous embête.
J'aurais pu être millionnaire Avec piscine et vue sur la mer Mais je suis dans la merde Et je vous emmerde ! Sentimentalement, démissionnaire Professionnellement, suicidaire Tu vois, moi je…
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