Morceau
Étouffé par des barres d’immeubles, n’importe où l’on pose notre regard, le même gris terne du béton délabré. À Saint-Denis, loin de Paris, deux jeunes prodiges pleins de colère, Kool Shen et Joeystarr alias le Suprême NTM, n’ont qu’une envie : brûler leurs prisons à ciel ouvert et tout ce qu’elles produisent. Ils se font la voix des habitants des quartiers populaires qui en ont marre de vivre dans des conditions misérables. En cette fin des années 90, la tension monte dans les banlieues. “Qu’est-ce qu’on attend”, c’est l’expression de cette rage. Il est le morceau phare de Paris sous les bombes, troisième album de NTM sorti en 1995.
Dans “Qu’est-ce qu’on attend”, Kool Shen expose les causes de la frustration des banlieues ; Joey Star, lui, explose. Avec son rap technique et réfléchi, très influencé par les codes du rap old school, Kool Shen pointe du doigt les problèmes récurrents dans les quartiers populaires et le manque de réaction de l’État, qu’il juge à côté de la plaque. L’huile est répandue, c’est au tour de Joey Starr de faire jaillir l’étincelle avec sa voix brute, son débit explosif et ses textes percutants. Le temps n’est plus à la réflexion, place à la colère, seul moyen d’être entendu.
Ce cri a pourtant tant besoin d’être entendu ; c’est Suprême NTM qui va le lancer au nom de la jeunesse des quartiers qui se sent oubliée. “Qu’est-ce qu’on attend” fait du bruit et touche de plus en plus de jeunes, mais choque en haut-lieu.
L’État, la justice et les médias s’enflamment. Des procès sont intentés contre les performances “outrageantes” de Suprême NTM sur scène. Selon certains médias, des émeutes auraient éclatées suite à la sortie du morceau, décrit comme une incitation à la haine, plutôt qu’un chant révolutionnaire.
Ce morceau s’inscrit dans un contexte très précis, celui de la France des années 90 où “l’intégration” devient un sujet politique brûlant et le rap se fait la voix d’une critique radicale d’un système qui stigmatise une partie de la jeunesse. Un rap bien éloigné de celui de la génération suivante qui célèbre sans vergogne les valeurs de ce même système. Les temps changent.
[Refrain] Mais qu'est-ce, mais qu'est-ce qu'on attend pour foutre le feu ? Mais qu'est-ce, mais qu'est-ce qu'on attend pour foutre le feu ? Mais qu'est-ce, mais qu'est-ce qu'on attend pour foutre…
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