Style
Déjà repérée dans le vocabulaire du jazz, l’expression apparaît vers le milieu des années 40 dans des titres de rythm’n’blues. « Tangage et roulis »… en gros il s’agit de faire l’amour, ce que suggère la danse dans laquelle les corps s’enroulent et se repoussent sur un tempo rapide. Largement répandu par un réseau diffus de radios noires, le rythm’n’blues excite les oreilles de jeunes blancs du Sud et les détourne d’une variété insipide et asexuée que diffusent largement la télévision naissante et les gros réseaux de radios. Ils découvrent dans ce rythm’n’blues des espaces de transgression, des rythmes et des façons de chanter étrangers à la tradition musicale blanche du sud des Appalaches (le country and western, le hilbilly) dont ils sont nourris. Celle-ci met d’autres instruments à l’honneur : la guitare et avec elle les instruments à cordes pincées (mandoline, banjo, contrebasse), le violon (fiddle) et aussi l’harmonica, instrument européen dont les premiers bluesman s’étaient emparés, car il est facile à jouer et à porter.
L’écho de cette musique noire si excitante est tel, que les jeunes blancs des milieux populaires (ouvriers des villes et des campagnes) ne tardent pas à la danser puis à la jouer, bravant les interdits. En effet, des campagnes inspirées par les milieux religieux réactionnaires mettent en garde contre « la musique des nègres », diabolique par essence. Mais le coup est parti. Des petits labels de disque, des disc-jockey, des journalistes soufflent sur ces braises naissantes. Un crooner de deuxième catégorie sent le vent venir et devient le premier rocker blanc. Avec Rock around the clock, publié en 1954, Bill Haley propulse dans les hit-parade une copie pâle mais suffisamment entraînante des titres noirs.
Mais c’est par la voix superbe et la gueule d’ange d’un jeune camionneur de Memphis, Tennessee, que le rock’n’roll va devenir cette révolution musicale qui, comme aucune autre, aura profondément marqué les modes de vie et de pensée de millions de personnes dans le monde. Elvis Presley publie une première chanson, That’s all right, Mama, reprise au bluesman Arthur Crudup, qui le fait remarquer par le directeur du label Sun Records. Spécialisé dans le blues et le country, Sam Philips cherche et espère trouver « la voix », « le style », qui vont réunir ces deux musiques, la musique des noirs et celle des blancs. Il sent que l’époque, les jeunes, attendent cela. Elvis Presley en est la sublime incarnation. Il chante comme un noir, impose un style aux accents dramatiques soutenus, cultive une allure revêche bien en phase avec les tendances du moment (voir le film Graine de violence/Blackboard Jungle, avec Marlon Brando ou la figure d’adolescent écorché de James Dean), danse de façon érotiquement suggestive (on le surnommera le Pelvis, jeu de mot sur pénis et Elvis) et, enfin, plonge un regard de braise dans les yeux de ses auditeurs, augmenté d’une moue aguicheuse de la lèvre supérieure.
Pris en main par un business implacable Elvis accèdera à la carrière que l’on connaît. Il laissera une emprunte toujours vivante sur les modes et les comportements.
Si forte soit-elle, sa silhouette n’occultera cependant pas d’autres acteurs majeurs du rock’n’roll : Chuck Berry, qui invente la chanson rock et fait de la guitare son instrument roi, Buddy Holly, maître en mélodies savantes, Gene Vincent, Eddie Cochran ou Little Richard, chanteur noir sulfureux et showman accompli.
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