Sandra Nkaké

Dès son jeune âge, Sandra Nkaké aime chanter et rapidement la musique devient son moyen d’expression privilégié. A la maison, un généreux mix maternel de Francis Bebey, Chopin, Dylan ou Fela Kuti et Aznavour fabrique son oreille et sa sensibilité. Se destinant à l’enseignement, elle bascule à force de fréquentations joyeuses et dansantes avec Juan Rozoff et autres funksters parisiens. Elle y affirme sa voix, douce et un peu rugueuse, qu’elle porte sur scène avec une grâce folle et prend part à de nombreuses aventures musicales, autant d’expériences qui lui permettent de s’affirmer sur la scène musicale non sans se heurter aux barrières dressées sur le chemin d’une artiste, femme noire, refusant de se laisser enfermer dans les cases convenues. Pas simple, souvent douloureux. D’autant plus que Sandra s’implique dans le monde, est préoccupée de justice et de dignité et n’hésite pas à prendre parti quand elle en éprouve le besoin.

Liée à de nombreux projets, dont l’excellent Push Up avec Jean-Philippe Dary, elle décide de tracer sa route en 2008 avec Mansaadi où le cap est nettement donné pour une musique économe d’essence funk, tressée d’effluves vocales empruntant à divers registres de la tradition africaine ou gospel. C’est une magnifique réussite qui lui permet de tourner dans le monde et de gagner en rayonnement. Suivront Nothing for granted (2012) aux orchestrations soignées et Tangerine Moon Wishes (2017) à l’ambiance très apaisée où elle chante de bien belles chansons en français, albums qui ne l’empêchent pas de multiplier les collaborations avec, entre autres, Stéphane Belmondo ou Grand Corps Malade, toujours entre jazz et chanson.
Une Victoire de la Musique acquise en 2012 vient conforter la reconnaissance d’une artiste interprète, autrice et compositrice majeure.

On retrouvera la femme de combat dans plusieurs évènements de la vie politique et culturelle, tel cet impromptu de “We Shall Overcome”, le fameux chant des droits civiques, chanté place de la République le 10 juin 2020 avec Camélia Jordana, Pomme et Jeanne Added, en hommage à George Floyd, un Afro-Américain mort sous les coups de la police à Minneapolis quelques jours plus tôt. Elle participe aussi à l’album “Les amoureux au ban public” qui dénonce la situation faite aux couples binationaux dont un membre est expulsé.

En 2023, la Franco-Camerounaise livre un quatrième album bouleversant et magnétique. Une invitation, rock et folk, avec des pointes électro-jazzy, dans un registre introspectif, à célébrer la vie et la voix des femmes. Scars - cicatrices en français, celles de la vie - est un album, dont les onze morceaux, en français, anglais et en douala ne laissent pas indemne. Elle y opère un regard rétrospectif sur une existence déjà bien remplie, pleine d’obstacles surmontés, de violences subies et d’échecs avalés, mais aussi bien sûr des rencontres, des joies et des rêves aboutis. La vie sans fard.
En 2024, elle reprend Scars pour une version plus longue, avec trois anciens morceaux qu’elle va remixer en y apportant une nouvelle touche et de nouvelles paroles. Elle les jouera sur la scène Zebrock de la Fête de l’Humanité en 2024, scène qu’elle a déjà foulée en 2010 avec Push Up.