Morceau
Il est parfois des chansons dont on ne soupçonne pas le potentiel avant qu’elles explosent. Par exemple, « Bohemian Rhapsody », morceau en lequel croit le groupe Queen, envers et contre tous. « Song 2 » est de celles-ci. En 1997, le groupe de rock britannique Blur, emmené par le charismatique Damon Albarn (aussi leader de Gorillaz), sort de presque une décennie de rivalité savamment mise en scène avec le groupe Oasis. Dans les années 1990, les deux groupes se livrent en effet une guerre fratricide pour le titre de rois de la Britpop : albums contre albums, singles contre singles. Après le succès de Parklife (1994) et The Great Escape (1995), Blur a du mal à se remettre au travail. Le groupe décide de rompre avec ce genre qui l’étouffe et sort en 1997 son album homonyme qui, sans connaître un vrai succès, contient le morceau de bravoure « Song 2 ».
« Song 2 » devient rapidement le plus grand succès du groupe et rafle toutes les récompenses. Deuxième piste de l’album, d’une durée de 2 minutes 02, avec deux couplets et deux refrains, les concordances sont trop belles pour être du hasard. « Song 2 » (chanson n°2 en français) conserve le nom brouillon d’une maquette de base, comme une version martyre qui pourrait finir à la poubelle, un échauffement avant de passer aux choses sérieuses et à ce que les fans attendent. Car à l’origine, le morceau n’était qu’une blague. Une blague du groupe à son label. Le groupe enregistre d’abord une démo acoustique, avec l’emblématique « woo-hoo » sifflé. Le guitariste, Graham Coxon, voit dans ce titre la possibilité d’exagérer et de tourner en dérision les codes et les sonorités du rock : tempo soutenu, grosses guitares qui tâchent, des textes et un chant rageurs comme ceux du grunge américain. Bref, de l’anti-Britpop. Pour rigoler, Blur présente ce pied-de-nez à son label… Qui reçoit l’idée avec enthousiasme. « Song 2 » sortira en single pour de vrai. Le groupe en reste bouche bée.
La suite, on la connaît. Un clip explosif qui n’est pas sans rappeler Nirvana et un succès phénoménal. Un titre brut qui vous file la pêche à coup sûr et un cri devenu culte. Un morceau qui s’est élevé au niveau d’autres standards du rock comme « Smells Like Teen Spirit » de Nirvana ou « Highway To Hell » d’AC/DC, au point d’être même joué par mille musiciens au Stade de France, en 2019.
Arriver à être excellent en essayant de se saboter, c’est peut-être ça le vrai talent. Woo-hoo !
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