L’envie de mater des séries toute la journée en jogging et de tout remettre (surtout les devoirs et le boulot) à demain est tenace. Suzane a choisi d’en faire sa meilleure amie. Une stratégie payante ?
Suzane en 2020 (via Lillelanuit.com)
Fille du Sud née en Avignon, Océane Colom a choisi le prénom de sa chère grand-mère maternelle, en lui enlevant une lettre par coquetterie, pour se jeter à corps perdu dans le grand bain de la scène pop et electro de cette fin de la décennie 2010. Suzane donc, nourrie de Fréhel, de Piaf et de Brel, se voit d’abord danseuse. De formation classique, elle lâche subitement le conservatoire de danse à 18 ans, fatiguée des diktats pesant sur les corps, des sacrifices qu’exigent cet art. La jeune femme devient serveuse, court les nuits parisiennes, découvre l’électro et trouve enfin sa voie. Ce sera la musique avec un mélange subtil de chanson, d’electro-pop et de danse. Ces deux premiers EP sortis en 2018, « L’Insatisfait » et « La Flemme », reflets de ses expériences et de ses émotions, font mouche auprès des professionnels de la musique. Deux ans plus tard, Suzane sort son premier album, Toï Toï, accumule les millions d’écoutes en streaming et reçoit une Victoire de la musique pour ses performances sur scène ! Qui pourra l’arrêter ?
« I am a badass » / “Je suis une dure à cuire” (Brooke Lark via Unsplash)
Pour beaucoup, la fin des années 2010 sera le temps de la difficile libéralisation de la parole des femmes, les mouvements mondiaux #MeToo et #Balancetonporc qui font éclater le lourd silence pesant sur les femmes harcelées, agressées, battues. Leur arme principale : les réseaux sociaux. Dans la musique aussi, peut-on parler d’une nouvelle ère plus féminine ? Une nouvelle génération d’artistes féminines se font connaître via leurs comptes Insta, Facebook, TikTok, à une vitesse fulgurante. Fortes de leurs écoutes et de leurs vues, elles s’imposent sur scène avec leurs univers mélangeant pop, electro ou hip hop. Certaines comme Pomme ou la Norvégienne Girl In Red ont commencé dans leur chambre d’ado, d’autres, comme Angèle ou Aya Nakamura ont été propulsées au sommet en un éclair. Toutes ses filles bien d’aujourd’hui revendiquent leur singularité mais une chose les rapproche : elles ne se laissent pas faire.
Suzane aime raconter des histoires et inventer des personnages dans ses chansons. On peut même dire qu’elle en est un elle-même, avec sa combinaison de ninja bleue très « Kill Bill » dans laquelle elle peut faire le grand écart sans difficulté. A l’aise, Suzane avec ses beats efficaces et ses instrus minimalistes qui servent le texte et non l’inverse. L’artiste nous présente sa copine la flemme, une copine qu’on a tous d’ailleurs. La flemme de Suzane est très actuelle : c’est la reine des écrans, elle procrastine à fond et elle a une influence redoutable. En quelques phrases Suzane nous dresse un portrait vivant et bien senti de la paresse d’aujourd’hui que l’on a tous ressentie, celle qui nous pousse à rester chez nous et à scroller toute la nuit (même sans être confiné).
Je te présente ma copine la flemme Je la connais depuis le lycée On dit que c'est une fille à problèmes Qu'elle ne fout rien de ses journées Que je me traîne c'est parce qu'elle m’entraîne A ne…