Élevé dans un 25m carré, Tu passes tes journées dans un décor de béton armé, Un quotidien synonyme de morosité, Droit chemin ou réalité, Tu crois être bon mais t'es mauvaisDub Inc, extrait de « Rude Boy », 2003
Thème central de la musique reggae : chanter la réalité vécue par ceux qui souffrent, qu’ils viennent des ghettos de Kingston ou des banlieues de France. Le reggae est la musique des « sans-voix », des « raggamuffin » que l’on ne prend pas au sérieux. De nombreuses chansons parlent donc de la difficulté du quotidien, de la pauvreté et de la violence.
Le reggae est l’héritier d’une histoire faite de conquête (la Jamaïque fut conquise par les Espagnols en 1494, puis par les Anglais en 1655), d’occupation (l’île obtient son indépendance seulement dans les années 1960), d’exploitation et d’esclavage qui a profondément marqué ceux qui le joue et qui l’écoute. Musique de révolte et de contestation, le reggae se diffuse dans les années 1960-1970 partout où les peuples réclament plus de justice, se battent pour la fin du colonialisme.
Deux grands personnages historiques sont au cœur du discours du reggae : Hailié Sélassié 1er, empereur d’Éthiopie de 1930 à 1974, grande figure de la résistance à la colonisation et l’intellectuel jamaïcain Marcus Garvey (1887-1940), qui lutta toute sa vie pour la fierté noire. Retour dans le passé. Entre 1680 et 1786, l’Empire britannique déporte près de 2 millions d’Africains vers ses colonies pour les réduire en esclavage. La Jamaïque en fait partie et compte environ 300 000 esclaves noirs à la fin du XVIIIème. La grande majorité des Jamaïcains ont des ancêtres africains. L’Afrique occupe une place importante dans leur culture et dans le reggae : il s’agit des racines (« roots » en anglais) des habitants de l’île. Le message du reggae est clair : tous les Noirs sont frères, issus d’un peuple opprimé, et l’Afrique est leur continent, leur mère patrie. Avec leurs longues dreadlocks ressemblant à s’y méprendre à des racines, les rastas portent fièrement leurs « roots »…
A people without the knowledge of their past history, origin and culture is like a tree without roots. Un peuple qui ne connaît pas son passé, ses origines et sa culture ressemble à un arbre sans racines.Marvus Garvey (1887-1940), intellectuel et activiste né en Jamaïque, un des premiers penseurs du nationalisme noir.
Dans la Bible, Sion (« Zion » en anglais) est la terre promise : Jérusalem. Dans la culture reggae, la terre promise est celle des racines géographiques, l’Ethiopie, berceau de l’humanité et le royaume de l’empereur Hailié Sélassié, mais aussi des racines spirituelles. On retourne aux valeurs de paix, de fraternité et de liberté qui étaient de mise avant l’ère de l’esclavage et de l’oppression.