Peu connu du grand Public ce groupe a laissé une trace légendaire dans le monde du rock américain, plus précisément celui de l’Americana, où la tradition folk retrouve des airs de jeunesse. Né au début des années 80 en Californie, ils ont jeté les bases d’un revival rock-à-guitares qui devint très populaire notamment avec REM et les Jayhawks. Ils n’en connurent hélas pas le succès en dépit d’albums remarquables et remarqués par la critique. Ils jouent un rock élégant et nerveux qui cultive ses influences avec un grand soin. Le leader du groupe Syd Griffin est resté musicien, mais a aussi entamé une belle carrière de critique rock et d’auteur : il en est devenu une des plumes les plus fines et réclamées. Toujours actif dans le circuit très dense des petites salles de concerts et des campus universitaires, The Long Ryders nous revient en 2020 avec ce titre qui se veut foncièrement militant. Il s’agit presque d’un clip de campagne pour battre Donald Trump.

Ce titre et son clip sortent en plein milieu de la campagne électorale de 2020 et se campent volontiers comme un brûlot anti-Trump. Les paroles elliptiques, aux relents bibliques, ont tout du pamphlet virulent. La cible apparaît dès les premières secondes : Trump est un menteur et toutes les images en soulignent les contradictions et moquent la dévotion dont font preuve ses partisans. Mais, surtout, elles mettent l’accent sur le fait qu’aux yeux du groupe, le président sortant constitue une menace pour les américains, l’environnement et le monde (excusez du peu !). Les Long Ryders reprennent le rôle qu’eût avant eux un Country Joe Mc Donald qui sur la scène de Woodstock conspuait la guerre du Vietnam, tandis que d’autres groupes, Chicago par exemple, moquaient le président Richard Nixon, aliasTricky Dicky. Longtemps muets, de nombreux artistes se sont manifestés ces derniers mois et ont pris part publiquement au débat politique, notamment entrainés par la campagne du sénateur Bernie Sanders, figure majeure qui a remis en selle la gauche américaine.

Cette chanson et son clip sont publiés, quasiment en état d’urgence, à quelques semaines du 3 novembre, jour du vote pour l’élection présidentielle (et aussi pour de nombreux autres représentants). Le climat de passion qui anime cette campagne est à des niveaux rarement atteints, d’autant plus qu’elle se déroule dans un climat de pandémie COVID-19 qui a fauché la vie de 200 000 personnes. Le président sortant, Donald Trump richissime homme d’affaires, attise les tensions à coup de tweets rageurs, d’analyses approximatives et de signaux envoyés à la frange la plus à droite, voire la plus extrémiste, de son électorat religieux et conservateur. Elu en 2016 du fait des subtilités complexes du scrutin aux Etats-Unis, alors qu’il avait moins de voix que sa concurrente Hillary Clinton, Trump joue la tension à coups d’insinuations sur l’intégrité du scrutin et d’accusations quant à des manipulations chinoise ou russes. Les deux camps se mobilisent et les rockers, tels les Long Ryders, ne sont pas en reste. Et le monde retient son souffle.