Kash Leone, rappeur, beatmaker et ouvrier
Douze ans à la chaîne à Aulnay et une passion pour le rap qui le conduit à postuler avec succès au Grand Zebrock 2011, avec son complice Tango, Kash Leone est un rappeur d’Aulnay-sous-Bois. Né à Drancy en 1978, Franck est un pur produit du 9-3. Ouvrier chez Peugeot, à la façon d’un Didier Wampas, il utilise son temps libre à aiguiser sa plume sur des rimes qui traduisent un véritable regard inquiet et combatif sur le monde qui l’entoure. A rebours d’un rap gonflé à l’égo et au fantasme de l’argent facile, nous trouvons chez lui l’affirmation d’une conscience sociale forgée dans le travail à l’usine. Il acquerra une forte notoriété en publiant ce clip “Ca ne peut plus durer” au cœur du conflit PSA à Aulnay en 2013, mais aussi en travaillant avec nombre de pointures du rap : Sefyu, Alibi Montana, Kenny Arkana, entre autres.
Le site PSA à Aulnay-sous-Bois
Juillet 2012, juste avant les congés, la nouvelle est confirmée, dure à encaisser : PSA fermera son site d’Aulnay-sous-Bois en 2014. L’immense complexe industriel installé là où s’entremêlent les autoroute A1, A3 et A4 près de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, a été construit au début des années 70. Plus de 3500 ouvriers et techniciens s’y affèrent à construire les modèles phares du groupe : Peugeot 205, Citroën… L’annonce fait l’effet d’une douche froide, quelques années après les révoltes urbaines de 2005, dans un territoire déjà meurtri par les nombreuses fermetures d’usines et disparitions d’empois qui ont marqué les années précédentes. La mobilisation forte ne suffira à faire renoncer ni la direction et les actionnaires du groupe ni le gouvernement qui avalise la décision au nom de la compétitivité, éternel argument des délocalisations. La colère tonne, Kash Leone s’en fait l’écho.
La chaine de production de PSA
Retour aux fondamentaux du rap, cette musique populaire du petit peuple de quartiers ouvriers, qui dénonce les injustices et mobilise pour l’égalité. Conçu et filmé par un ouvrier qui construit des voitures, il ne fait pas l’éloge des grosses cylindrées et calandres clinquantes : on y parle de lutte, de politique économique. Les actionnaires toujours plus avides en prennent pour leur grade et on dénonce les cadences sur les chaînes de production. Morceau porte-étendard d’une lutte difficile, il n’en est pas moins une belle réussite stylistique, à l’ancienne certes, mais du genre à bien vieillir.