« Vous les copains je ne vous oublierai jamais », chantait Sheila en 1964. Derrière cette artiste yé-yé par excellence se cache Annie Markan, Markhan de son vrai nom. Enfant du baby-boom elle se tourne vers le chant puisqu’ à seulement neuf ans elle entre à la Maîtrise de l’ORTF (Office de Radiodiffusion-Télévision Française), pour devenir choriste. Le goût du chant et l’explosion juvénile des années 1950, poussent Annie à plonger dans le grand bain et accompagner des chanteurs connus comme Gilbert Bécaud. Ainsi elle commence sa carrière dans l’ensemble vocal Les Djinns en 1959, puis décide ensuite de créer un groupe plus moderne, GAM’s, en 1963 connu pour le tube « Il a le truc » où elle chante en soliste. C’est la grande vague des yéyés. En 1975, Annie Markan abandonne la chanson et devient une des plus efficaces et flamboyantes attachées de presse de Paris. Elle a accompagné de nombreux artistes.

Bienvenus dans les années 1960, une décennie riche musicalement avec l’apparition du mouvement « yé-yé » comme on désignait avec une pointe de mépris les chanteurs français qui reprenaient les tubes américains, par exemple Johnny Hallyday et son tube « Le pénitencier » adapté de « The House Of The Rising Sun », vieille chanson traditionnelle devenue un standard du rock. Pour la première fois les jeunes ont des idoles de leur âge, on peut écouter la musique sur son transistor entre ami.e.s et l’argent de poche permet d’acheter des 45 tours. La fin de la guerre d’Algérie soulage les filles et les garçons qui se remettent à parler d’amour. C’est la croissance des Trente Glorieuses où apparait la société de consommation qui nous inquiète tant aujourd’hui. Les yéyés sont légers et dansants. Claude François, Antoine, France Gall, Jacques Dutronc, Françoise Hardy, Sheila et les autres ouvrent ainsi une époque de libéralisation des mœurs. Les années 1960 marquent une grande étape du mouvement d’émancipation des femmes, avec la pilule mise sur le marché en France en 1966, la création du planning familial français et les prémices de mouvements féministes et politiques influencés notamment par Simone de Beauvoir et son ouvrage Deuxième Sexe (1949). 1968 n’est pas loin.

« Ce n’est que de l’eau » est un standard de jazz, une bossa nova qui nous vient du brésilien Antônio Carlos Jobim sous le nom d’ « Agua de beber ». La bossa nova est une musique populaire des années 1950 au Brésil, reconnaissable par son rythme particulier, doux et dansant. Cette chanson a voyagé, on la connait aussi dans les pays anglo-saxons comme « Drinking Water » chantée par Frank Sinatra. Les paroles ont été changées dans les trois versions, chacun s’appropriant le thème de l’eau : Sinatra compare l’eau à l’amour, Jobim parle de l’eau à boire et Annie Markan convoque l’eau pour les larmes du chagrin amoureux ou pour l’obstacle qu’il faut surmonter, symbolisé par l’orage. On retrouve chez Annie Markan la patte yé-yé d’adaptation des paroles, en français et sur un thème léger, ici l’amour. Insouciance, insouciance !