L’electro, musique contre-culturelle, créée et diffusée par les canaux secrets des passionnés et des raveurs, a aussi pris le chemin des radios de grandes écoutes et des boîtes de nuit les plus connus. Elle mute pour produire un sous-genre, la dance, musique de machines dont l’objectif est simple : faire danser le plus grand nombre, réunir les fêtards du monde entier jusqu’à l’aube comme la fait le disco il y a quelques décennies. Mission réussie pour l’un de ces magiciens, David Guetta.
David Guetta au One Love Tour Mexico 2010 via Wikipédia.
Décrié pour le caractère délibérément grand public et commercial de son travail, ainsi que l’élitisme de ses prestations branchées, mais adulé pour son sens aigu du son et du rythme, Guetta est LA touche française. De premiers pas en radio puis la fréquentation assidue de boîtes parisiennes dont il devient le DJ demandé, le conduisent rapidement et jeune à tenir une place importante dans le monde de la nuit révolutionné par l’arrivée de la house music et de l’électro. Avec Guetta, le DJ n’est plus anonyme, il devient une star. Les soirées à Ibiza et dans les plus grands clubs et des remixes imparables qui lui valent l’amitié d’artistes majeurs tels David Bowie, Britney Spears, Lady Gaga et Madonna portent David Guetta au sommet de la popularité. Il est aujourd’hui la figure d’une musique mondialisée, le DJ le plus connu, comblé de multiples récompenses toutes plus honorifiques les unes que les autres.
Quand ce titre paraît, David Guetta est déjà en haut de l’affiche. A-t-il besoin des stars ou ont-elles besoin de lui ? Sans doute les deux. Dans un monde de la musique en totale mutation, bouleversé par l’arrivée de YouTube (créée en 2005, revendue à Google en 2006 pour 1,65 milliards de dollars) et visité par un milliards d’abonnés en 2010. Dorénavant la musique passe par les réseaux sociaux, tout comme l’information. Ils joueront d’ailleurs un grand rôle dans la propagation des révolutions du Printemps arabe, notamment en Tunisie. Dorénavant tout circule vite, on sait tout très vite…même ce qui est faux ou n’existe pas.
Couvert de récompenses toutes plus prestigieuses les unes que les autres, ce titre de 2009 est un des plus fameux du DJ français le plus populaire au monde. Le mix habile d’une descente d’accords au piano très agréable et familière à l’oreille occidentale (on la retrouve dans bien des titres) la rythmique entraînante (et aguicheuse) ; les nappes de synthétiseur enveloppantes ; le chant dramatique, juste comme il le faut de Kelly Rowland, voluptueuse star planétaire issue du groupe Destiny’s Child… tout y est ! L’affaire est entendue : voici une des chansons les plus populaires de la décennie 2000 portée par un clip lui aussi parfaitement réalisé. Kelly Rowland y multiplie les mimiques, moues et regards sexy tandis que le DJ, David Guetta, monte le sound system qui fera fuir la mélancolie sur fond d’Océan Pacifique de rêve.
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Né en 1980 à Boulogne-Billancourt, Erwan Castex, alias Rone, a commencé à composer ses mu-siques de machine dans sa chambre avec quelques amis. Des années plus tard, il se produira sur scène à guichet fermé dans la mythique salle parisienne de l’Olympia et obtient la décoration ho-norifique de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Pour comprendre ce qu’il s’est passé, il suffit de l’écouter. Frissons garantis sur fond de sonorités synthétiques.
Chacune des créations musicales de Rone est une histoire à elle seule. Inspiré par l’univers dé-janté du producteur Aphex Twin et des nappes planantes du musicien Brian Eno (ex-claviers de Roxy Music entre autres), Rone produit des albums colorés emplis d’émotions qui assurent un aller simple dans le monde des rêves et de l’imagination.
Il est l’un des premiers artistes électro à jouer à la Philharmonie de Paris en 2017, après Jeff Mills, où une véritable expérience à la fois sonore et visuelle y fut proposée, à l’image de sa musique. Rone ne cesse de créer des synergies entre les différentes disciplines artistiques. Il s’associe avec l’écrivain de science-fiction Alain Damasio avec lequel il produit en 2009 la piste « Bora Vo-cal », véritable plongeon dans le processus de création artistique.
Il fait trembler en 2020 les murs du grand théâtre de Châtelet à coup de beats électroniques en accompagnant le ballet national de danse de Marseille (La) Horde sur le spectacle A room with a view. Rone modernise les répertoires et permet à la musique électronique de se faufiler dans des lieux où elle n’avait pas encore sa place.
Venus de Grenoble, Caroline Hervé et Michel Hamato, alias Miss Kittin et The Hacker, font partie des artisans de l’anti-French Touch, l’electroclash. Le duo s’est formé en 1997 au cours des raves et des teufs techno de l’époque. L’atmosphère y était radicale, au couteau. Comme le sera leur musique à la fois minimaliste, trash et sombre à souhait. La voix douce de Kittin raconte des histoires de sexe, bien sûr, de drogues et de fête, comme si le futur n’existait pas.
Kittin and The Hacker sort First Album en 2001 sur Gigolo, LE label de l’electroclash fondé par son parrain, DJ Hell. Des morceaux comme « Frank Sinatra » les installeront définitivement sur la scène electro européenne. Depuis, seuls ou à deux, Kittin et The Hacker manient le clair-obscur électronique que ce soit sur la scène des plus gros festivals ou dans des clubs ultraconfidentiels, sans paillette mais avec constance et talent.
Behdad Nejatbakhshe Esfahrani, alias Uppermost, nait en 1989 à Paris. Ado, il se plonge dans les courants de l’electro, de la trance, de la dance de la fin des années 90, mais aussi Deadmau5, Daft Punk, Justice, et autres classiques de la musique de machines.
Après s’être dit “Pourquoi pas moi ?”, il télécharge des logiciels de MAO. C’est le début d’une aventure qui offrira à l’électro française et mondiale de magnifiques albums. Autodidacte, il progresse sur FL Studio, se fait remarquer sur des plateformes spécialisées grâce à des titres électro-house appréciés par certains DJ de club de l’époque. En 2009, Uppermost atteint la 3ème place du classement électro house sur Beatport, et la première place sur Juno en 2011.
Pendant ce temps, il monte son label, Uppwind, sur lequel il sortira quasiment toutes ses productions à commencer par son premier album, Action, en 2011. Ses premiers fans découvrent alors ses synthés gras et distordus, en même temps que ses techniques de découpage de samples, mais aussi ses phases aériennes et contemplatives.
Album après album, il trace sa route, développe pleinement son style, et acquiert une jolie reconnaissance. Sa maitrise de la MAO* n’est plus à prouver auprès des amateurs qu’il a marqués grâce à ses basses agressives, sa superbe exploitation des FX*, ses riffs de synthé hyper émotifs, et son sampling de voix autant étrange qu’agréable. C’est d’ailleurs grâce à cette dernière technique qu’il fera des millions de vues sur Youtube avec « Beautiful Light », qui sample, entre autres, la voix de la chanteuse Birdy. Cerise sur le gâteau : Uppermost est fan des Daft Punk, et ça s’entend !
Aux dernières nouvelles, le DJ est toujours aussi productif et cherche à varier les styles comme à son habitude, en faisant de la deep house par exemple. Son label produit maintenant d’autres artistes et il monte même sur scène de temps en temps.
Si ça vous tente, écoutez ses meilleures pistes dans la playlist ci-dessous.
Un flûtiste maudit par Apollon, revenu d’entre les morts pour faire vibrer le monde. C’est la légende que s’est choisie Guillaume Brière en enfilant un masque de squelette tatoué d’un cœur rouge. Producteur influent des scènes rap et pop, DJ reconnu à l’international, headliner récurrent des festivals de l’Hexagone, en devenant Vladimir Cauchemar, l’ex-membre des groupes The Film et The Shoes est désormais un incontournable de la musique électronique française.
Signé chez le légendaire label Ed Banger, c’est en 2016 qu’il se révèle au public pour la première fois en arborant ce masque qu’il ne quittera plus. Fin connaisseur du jeu de la viralité, le clip de « Aulos » fait le buzz et cumule des centaines de milliers de vues jusqu’à très vite devenir un meme sur les réseaux grâce à son atypique joueur de flûte.
Ce DJ aux influences variées s’inspire autant des musiques de films de Vladimir Cosma (vous l’avez ?), des pionniers de la French Touch comme David Guetta ou Daft Punk, ou encore de compositeurs baroques et classiques. De cette riche culture ressort une musique électronique novatrice, magnifiant l’art de faire du neuf avec du vieux. Depuis 2016, Vladimir Cauchemar occupe tous les étés les scènes des festivals français avec sa house sombre et entêtante, mêlant samples classiques, synthétiseurs et airs de flûtes traditionnelles aux rythmiques pulsatives de la techno ou de la bass house.
Autant que son buzz des premiers mois ou son omniprésence sur les scènes françaises et mondiales, ses collaborations avec des grands noms de la musique française et internationale contribuent beaucoup à son succès. Le rappeur star 6ix9ne aux États-Unis ; Jul, Laylow ou Clara Luciani pour la France… Le producteur ne recule pas devant les grands écarts artistiques et se jette dans l’expérimentation en ajoutant des noms toujours plus gros à son tableau de chasse. Après plusieurs séries de singles et d’apparitions diverses, Vladimir Cauchemar publie son premier EP, Brrr, en 2021, alignant encore une fois des collaborations avec la crème des rappeurs français du moment. De la house à la trap en passant par un remarquable morceau avec Benjamin Epps au goût très new-yorkais, sans oublier des interludes surprenants qu’on imagine tout droit sortis d’une bande originale d’animé japonais. Le mystérieux DJ s’amuse, et emmène ses auditeurs dans un voyage entre hip-hop et électro tout en montrant l’étendue de ses possibilités artistiques.