Pour énerver Pierre Perret, lui dire qu’il est un paradoxe vivant : tout à la fois auteur de chansons tendres, douces et sensibles, et de tubes « franchouillards » comme le Zizi ou les Colonies de Vacances. Depuis le temps qu’on le lui dit, il s’échine à expliquer qu’un homme n’est jamais d’un seul bloc ! Qu’il peut aimer la rigolade, les bonnes bouffes entre copains et la poésie la plus délicate. Qu’il peut savourer les grands textes de la langue française et vénérer l’argot des métiers, auquel notre homme a consacré un dictionnaire considérable. Perret, c’est en somme un Rabelais de notre temps, aussi bon vivant qu’il est cultivé. Souhaitons que ce compliment ne lui déplaise pas.
Pierre Perret (2)
On la trouvait plutôt jolie, Lily Elle arrivait des Somalies Lily Dans un bateau plein d'émigrés Qui venaient tous de leur plein gré Vider les poubelles à Paris Elle croyait qu'on était égaux…
Au Portugal, la révolution des oeillets impose la démocratie. En France, Giscard succède à Pompidou ; l’avion supersonique « le Concorde » est une fierté nationale, le musée Beaubourg impose son architecture originale dans Paris. La France avance mais trop d’usines ferment. La colère grandit et de nombreux chanteurs s’en font l’écho : Bernard Lavilliers, Renaud, Jacques Higelin… Avec le droit de vote à 18 ans, les jeunes vont compter : la gauche emportera les élections présidentielles en 1981.
Parce qu’il n’était guère coutumier des coups de gueule et des prises de position tapageuses, Perret sut avec ce titre frapper juste et précis. Ainsi donc, le rigolo de service savait aussi trouver les mots qui font mal et dire avec pertinence la vie quotidienne, la bêtise quotidienne, l’injustice quotidienne ? Si la fin en happy end est délicieusement naïve, on peut aussi se dire qu’il faut un début à tout. Pour que le monde change, encore faut-il que des gens décident à montrer le chemin…
Douce et légère, la mélodie a des allures de comptine et devient lyrique quand le propos l’exige. Le balafon, instrument traditionnel africain, introduit et ponctue la chanson de sa sonorité boisée. La guitare, le violoncelle et le violon puis le clavier se joignent à lui et produisent une atmosphère solennelle proche du gospel. Une rencontre musicale réussie entre l’Afrique, l’Europe et l’Amérique… vive le métissage !