Qu’elles soient modernes ou traditionnelles, d’aujourd’hui ou plus anciennes, les chansons nous aident à comprendre le monde où nous vivons.
Nous sommes convaincus qu’elles nous enrichissent.
Voici 20 titres que nous avons choisis pour vous. Tous ont quelque chose à dire et, à notre humble avis, le disent bien. Les mots sonnent juste, la poésie est forte, les vers font passer une émotion ou une énergie véritable. Les musiques lentes ou rapides, mélodieuses ou dissonantes sont parfois dans l’air du temps, parfois pas du tout. Dans des registres fort différents, elles épousent les textes et savent les mettre en valeur.
Voilà pourquoi nous tenons à vous les faire connaître.
Ensemble
ANNÉES 50 & 60
Patachou - Nous les filles (1955)
Yves Montand - Le chant des partisans (1955)
Claude Nougaro - Le jazz et la java (1962)
Georges Brassens - Les copains d’abord (1965)
Claude François - Comme d’habitude (1967)
ANNÉES 70 & 80
Pierre Vassiliu - Qui c’est celui-là? (1973)
Bernard Lavilliers - Fensch Vallée (1976)
Fabienne Thibeault - Les uns contre les autres ( (1978)
Serge Gainsbourg - Aux armes et caetera (1979)
La Souris Déglinguée - Allez les gars (1981)
Goldman et les autres - Les restos du coeur (1986)
Patrick Bruel - Place des grands hommes (1989)
ANNÉES 90 & 2000
Allain Leprest - S.D.F. (1998)
Thomas Fersen - Dugenou (1999)
Têtes Raides - Ennemis (2000)
Thomas Pitiot - Chebba Khadija (2001)
Camille - Paris (2002)
La Tordue - L’heureux mix (2002)
Diam’s - DJ (2003)
-M- - Mon ego (2003)
«Nous sommes comme les grains de sable sur la plage, mais sans les grains de sable la plage n’existerait pas. Nous ne sommes que des grains de sable, mais nous sommes ensemble. »
UN SEUL MOT D’ORDRE: MODESTES!
Nous nous comptons aujourd’hui quelques milliards d’une espèce humaine qui impose son rythme et ses exigences à la nature toute entière. Au point même, craignons-nous parfois, de bientôt l’épuiser.
Pourtant n’en concluons pas trop vite que nous sommes par prédestination les rois de ce monde. À l’origine, nos ancêtres communs n’étaient guère qu’une poignée. Une espèce finalement plutôt proche de l’extinction : un quelconque virus de type Ebola eût suffi à nous rayer définitivement de la carte. Cet “ensemble” là avait une espérance de vie plutôt précaire, de sorte que chacun de nous est en somme descendant d’une famille de rescapés. Voilà qui devrait inciter à la modestie.
Et puis, comparons-nous un peu aux espèces inférieures. L’évolution de nos connaissances nous invite aujourd’hui à admettre que nous partageons quelque 97 % de notre patrimoine génétique avec, par exemple, le singe Bonobo.
Cet être délicat possède une réjouissante particularité : il occupe l’essentiel de son emploi du temps aux saines joies de la copulation… Cela prouve que certains ont mieux que d’autres intégré à leur vie quotidienne le célèbre slogan des glorieuses sixties: “faites l’amour, pas la guerre”. Pour ce qui nous concerne, quelques progrès restent à accomplir !
Selon qu’on soit de nature pessimiste ou optimiste, adepte du verre à moitié vide ou plein, on tirera de ces deux affirmations scientifiques, de déprimantes ou réjouissantes conclusions.
POURQUOI TANT DE GUERRES?
Commençons par le côté sombre de la Comédie Humaine : il faut bien l’admettre, notre coexistence sur la planète Terre n’est pas tous les jours une promenade de campagne. Sur tous les champs de bataille et dans maintes cours de récréation où s’ébattent petits et grands, chacun reste le plus souvent convaincu d’avoir raison contre l’autre. Du coup, l’homme, depuis la nuit des temps, pourchasse, menace, étripe son semblable… sans que rien ne permette de répondre précisément à cette simple question: “… Pourquoi?”
Dans la première moitié du XXe siècle, deux personnages plutôt cultivés et reconnus pour leur intelligence, répondant l’un au nom d’Albert Einstein, l’autre à celui de Sigmund Freud, échangèrent autour de cette question cruciale une forte intéressante correspondance, sans aboutir à la moindre explication satisfaisante, du point de vue de la science évidemment. La guerre demeure pour eux le plus énigmatique de tous les mystères, et la seule conclusion qui vaille, c’est que, “quelque part”, on aime ça…
Au joli mot d’ensemble répond alors parfois ce soupir de soulagement : “enfin seul !”. Qui n’a jamais terminé sa journée, épuisé d’avoir croisé trop de crétins regroupés au mètre carré? Comme Alceste*, on se prend alors à rêver et partir chercher sur la Terre «un endroit écarté, où d’être homme d’honneur on ait la liberté»…
UN SEUL GENRE HUMAIN
Reprenons : au-delà de nos multiples différences, visages, langues et langages, coutumes, ethnies, religions, convictions, couleurs de maillots, nous sommes donc tous issus d’une seule et unique race. Voilà qui renvoie aux poubelles de l’histoire et de la science, tous les discours qui jusqu’à aujourd’hui affirmèrent la supériorité supposée des uns sur les autres. Pan sur le nez des racistes, nous sommes tous issus d’une même souche ! Cela devrait suffire à nous calmer et donner au mot d’ensemble sa signification la plus profonde, qu’on résumerait d’un mot: fraternité.
Il n’est pas interdit, il est même conseillé, de le décliner en divers sentiments nobles et réconfortants. Les poètes ont ce talent. Ils conjuguent amour, amitié, désir, complicité, partage, solidarité et toutes ces sortes de choses, ce dont témoignent les 20 chansons choisies pour ce livret.
SAVOIR CHOISIR SON CAMP
Nous parlions de guerres, pour souligner que le principe en reste souvent absurde. Mais ne soyons pas non plus angéliques ! Si nombre de conflits du passé et du présent peuvent avec le recul nous paraître incompréhensibles et auraient pu, auraient dû être évités, comme cette Première Guerre mondiale dont les historiens ont, aujourd’hui encore, bien du mal à définir “LA” cause, il en est d’autres qui exigeaient, au nom de la morale, du droit et de l’honneur, que l’on choisisse “le bon camp” et que l’on sache s’engager.
Oui, prendre des risques, se battre, ne relève pas toujours et loin s’en faut, du grotesque ou du hors sujet. Il existe même, au contraire, de nombreux exemples où la raison et la justice commandent. Aucun doute n’est permis, en cette année où l’on fête le soixantième anniversaire de la Libération, mieux valait par exemple fredonner “Le chant des Partisans” que d’entonner d’un ton martial et satisfait un “Maréchal, nous voilà“ de triste mémoire.
Il y avait là, dans ces années sombres, deux façons d’être “ensemble”, diamétralement opposées, dont nous comprenons bien qu’elles n’étaient en aucun cas équivalentes.
S’il ne s’était ainsi trouvé au fil des siècles, des êtres de courage et de conviction comme Jean Moulin et les héros anonymes de l’Armée des Ombres, nous en serions toujours à la case départ de la barbarie. Et sans ces êtres humains sensibles et généreux, dessinant les contours d’une société moins injuste, moins cruelle, moins absurde, nos vies ne seraient qu’un triste moyen-âge.
“Ensemble”, revient donc à relever ce défi, qui toujours nous sera posé : il faut avoir des convictions, savoir les affirmer, lutter pour elles… tout en nous méfiant, en nous défiant, des aveuglantes certitudes qui poussent à comprendre le monde comme un éternel et caricatural combat des Forces du Bien contre celles du Mal.
Ensemble, cela signifie qu’à l’autre, celui d’en face, notre ennemi d’hier peut-être, nous offrons ce “A” majuscule, qui signifie que nous le reconnaissons, comme nous, membre actif de l’Humanité entière : «Les hommes doivent, partout dans te monde, reconnaître leur appartenance au genre humain, avec l’ensemble des droits et des devoirs qui découlent de cette idée. » (Mikhael Gorbatchev)
Il faut parfois une vie entière pour réussir ce difficile pari. Alors ? Comment faire pour ne pas se planter? Pour ne céder ni à l’aveuglement, ni aux compromissions? Comment faire pour avancer, «sans jamais devenir sceptique ou destructeur, rêver, sans laisser ton rêve être ton maître, penser sans n’être qu’un penseur*»?
L’un des moyens est sans doute de nous imprégner de réflexions, d°un peu de distance. De nous nourrir de culture, de chansons.
En n’oubliant pas :
… Que «les braves gens n’aiment pas que, l’on suive une autre route qu’eux. » (Georges Brassens)
… Que «quand les hommes vivront d’amour, il n ‘y aura plus de misère, les soldats seront troubadours… » (Raymond Lévesque)
… Que «dépassé, le chacun pour soi!
Quand je pense à toi, je pense à moi…»
(Jean-Jacques Goldman et la chorale des Restos)
Héros du Misanthrope, pièce de Molière
* Hymne de la collaboration, dédié à Pétain
*** Extrait de Si…, Poème de Rudyard Kipling
Une chanson, ce sont des mots et des notes, des textes et des musiques, des paroles et des sons. Nous accordons toujours une grande importance aux mots : «J’aime bien ce qu’il dit», « Elle me fait rêver», «J’apprécie sa poésie», «Je suis d’accord avec ses idées » ou « Ça raconte n’importe quoi »; nous avons tous un jugement sur les textes.
Cependant, c’est toujours par le son, par la musique qu’une chanson nous pénètre et que nous y pénétrons à notre tour. Cela passe d’abord par l’oreille. Nos oreilles sont de fameux indicateurs auxquels nous pouvons faire confiance. La couleur, l’ambiance nous sont souvent indiquées par notre oreille et les milliers de souvenirs sonores qu’elles ont emmagasinés depuis notre naissance. Entre les deux oreilles, le cerveau stocke, répertorie et analyse ces sensations et nous propose toujours des pistes quand nous écoutons de la musique. Une guitare saturée, le scratch du D J ou le placement d’un son de clochettes, comme la façon de chanter ou de glisser des violons, nous suggèrent tout de suite une impression.
Et c’est souvent la bonne ! Car les chanteurs, les chanteuses, qui en général accordent de l’importance à ce qu’ils nous disent sont très attentifs à nous le dire aussi en musique. Une déclaration d’amour s’accompagne souvent d’une nappe de violons ou de la plainte d’un saxophone, tandis qu’un texte
dénonçant des injustices s’associera plus volontiers à un tapis rythmique lourd, parfois métallique. Mais attention : rien d’automatique dans cette affaire et souvent les meilleurs s’ingénient à colorer leur musique d’ingrédients inattendus, parfois bizarres. C’est la liberté qu’offre le travail artistique. Il permet de nous exprimer, de mettre à jour ce qui est au plus profond de nous-même, en toute créativité, en toute audace. Et souvent ceux qui nous attirent le plus sont ceux qui n’hésitent pas à innover. Passionnant, n’est-ce pas ?
Les chansons présentées ici par Zebrock n’échappent pas à cette règle.
Voilà ce que nous inspire par exemple « Ennemis », la chanson des Têtes Raides lorsque nous nous plongeons dans son univers musical:
Entendez-vous les mêmes références ? Pas sûr.
Qu’est-ce qui vous marque à la première écoute ?
Que découvrez-vous ensuite ?
Quelles sont les images qui vous viennent à l’esprit ?
À vous de jouer… et d’écouter !