C’était dans les années 60. La France pleurait la disparition de la « Môme Piaf ». Elle manquait désespérément d’une « chanteuse à voix ». Dans un télé crochet (sorte d’ancêtre sage des « Nouvelles Stars » d’aujourd’hui), elle découvre en noir et blanc ce petit bout de femme venu d’Avignon et lui déroule aussitôt le tapis rouge de l’affection. Devenue star, Mireille prête son visage au buste de Marianne, qui dans les Mairies de France représente la République. Comme elle est gentille, on a souvent ironisé sur sa naïveté. Inutile en vérité. Qu’on écoute ou pas ses chansons, elle apporte depuis cinquante ans du bonheur à des millions de fans, aux quatre coins du monde. Voilà qui suffit à remplir une vie.
Mireille Mathieu
Que l'on touche à la liberté Et Paris se met en colère Et Paris commence à gronder Et le lendemain, c'est la guerre. Paris se réveille Et il ouvre ses prisons Paris a la fièvre : Il la soigne…
En France la musique Yéyé, une bien pâle copie de tubes rock américains, accouche d’une ribambelle de chanteurs et chanteuses éphémères. Certains, comme Johnny Hallyday, sont cependant aux prémices d’une belle carrière, alors que les grandes personnalités de la chanson française arrivent à maturité, les Ferré, Brassens, Brel, Barbara, Ferrat, Gainsbourg, Aznavour et de nouveaux noms surgissent, tels Mireille Mathieu ou Claude Nougaro. Les musiques et danses du Brésil et d’Afrique commencent à devenir familières du grand public. Sciences et technologies font d’étonnants progrès : la greffe du cœur, la conquête spatiale et les ordinateurs toujours plus rapides. Enfin, la contraception est commercialisée en 1967 : les filles se sentent plus libres. Est-ce pour cette raison que la minijupe fait fureur ?
En 1966 sort « Paris brûle-t-il ? » le grand film de René Clément consacré à la Libération et conçu à la manière du non moins fameux « Le jour le plus long ». On y voit tous les héros impliqués dans l’Histoire, la 2ème DB du Maréchal Leclerc, Rol Tanguy et les FFI, le petit peuple de Paris et l’armée allemande en débâcle. Après cinq années d’occupation, d’humiliation, de collaborations, Paris se libère fièrement. C’est une chanson à la mesure de l’Histoire. Maurice Vidalin écrit une ode à Paris, la ville rebelle et orgueilleuse. Il magnifie en quelque sorte l’image qui depuis la Révolution française fait du peuple parisien, non sans raison, l’intransigeant et bouillonnant défenseur de la liberté.
Une phrase d’accordéon, un tempo de valse et des violons virevoltants pour une mélodie pleine d’allégresse, écrin parfait pour une voix claire et puissante, celle de Mireille Mathieu chanteuse extrêmement populaire dans la France des années 1965/85. Tous les ingrédients sont réunis pour une chanson en forme d’air d’opérette ou de comédie musicale célébrant le merveilleux avènement de la liberté. Paris est libéré, chante-t-on à tue-tête ! Elle ressemble à un hymne. L’accordéon semble venu des faubourgs pour se joindre à la majesté du grand orchestre et de ses violons. Maurice Jarre, père de Jean-Michel, est un des grands compositeurs de musiques de film d’Hollywood où il a conduit une somptueuse carrière.